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Changer de regard sur les addictions avec La Rose des vents

Certaines associations œuvrent discrètement dans le bassin nazairien. C’est le cas de la Rose des Vents qui aide à réduire les risques d’addiction en tous genres auprès de la population.

La Rose des Vents est une association loi 1901 crée 1986 à l’initiative de parents de  toxicomanes, de professionnels de la santé et d’élus nazairiens qui pour beaucoup ont été frappés par le sujet du VIH dans les années 1980. L’association, située en plein cœur de Saint-Nazaire, regroupe :
un centre de soins, d’accompagnement et de prévention addictologie (CSAPA) avec un accueil pour les jeunes consommateurs et leur entourage « Chez Marie-Jeanne » un centre d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues (CAARUD).

Bénéficiant du statut d’établissement médico-social depuis 2003, l’association est subventionnée par l'assurance maladie avec des dotations annuelles qui garantissent son fonctionnement. Pourquoi tant de temps entre (1986 et 2003) pour être reconnue ? Parce que comme l’explique Nathalie Thiétard, Directrice de La Rose des Vents, « Le champ de l’addictologie se structure petit à petit. Les CAARUD existent depuis 2005 grâce à une circulaire qui a aussi pris en compte l’histoire du VIH. L’État a permis à nos établissements de remplir leur mission de santé publique ».

La transdisciplinarité comme fil conducteur

Changer de regard sur les addictions ne se fait pas en un clin d’œil. Pour ce faire La Rose des Vents travaille sur un accompagnement transdisciplinaire : médical, social et psychologique. L’association insiste sur la nécessité d’accueillir la personne dans sa globalité et mettre en place des prises en charge multiples.
La création des CSAPA en 2010 a marqué un tournant important dans le domaine de l’addictologie. Les anciens centres d’accompagnement étaient plutôt répartis en deux domaines bien distincts et différenciés : l’un pour la toxicomanie et l’autre pour l’alcoologie. Les CSAPA ont permis d’ouvrir leurs portes à d’autres produits addictifs. Comme Nathalie le souligne « Les frontières bougent et nous avons introduit aujourd’hui les addictions comportementales, celle du jeu excessif, celle de la cyber dépendance, des comportements alimentaires. Nous constatons également qu’il y a de plus en plus de jeunes et nous avons mis en place un certain nombre de choses de façon à mieux accueillir l’ensemble des personnes poussant notre porte ».
Aujourd’hui l’association embauche 14 salariés. Elle a pourtant débuté avec trois salariés dans les années 80 mais appuyée par un partenariat local fort et ancrée dans les circuits de la ville, La Rose des Vents accueille près de 600 personnes* par an en suivi transdisciplinaire. La directrice explique « Il n’y a pas de règle dans le temps d’accompagnement d’une personne dans un CSAPA. Le principe est d’accueillir les gens là où ils en sont dans leur dépendance, certains ont une demande très élaborée, d’autre juste besoin de se poser ». Un accueil individuel et un accueil collectif sont mis en place. Tous les matins il est possible de pousser la porte de l’association pour parler ou prendre un café. En terme d’accueil, il y a des accueillantes expérimentées car c’est ce qu’il y a de plus complexe. Dans l’urgence, il faut savoir apporter les réponses mais aussi savoir les différer. Cela peut se concrétiser par des orientations extérieures, notamment quand les accueillantes vont traiter des problèmes de surendettement par exemple mais cela peut aussi être des orientations en interne.

La prise en charge de l’addiction en urgence, mais pas seulement…

Au sein de l’association, la personne dépendante aura la possibilité d’avoir un traitement de substitution, comme la méthadone par exemple, distribué par une infirmière et qui ne peut être initialisé que dans les centres comme celui de La Rose des Vents. Mais il ne s’agit pas de se pencher que sur le médical. Une fois la procédure de suivi enclenchée, les professionnels prennent en compte la personne dans sa globalité et font un travail sur ses conditions sociales et psychologiques. À cette dynamique s’ajoutent la médecine et la pharmacie de ville qui sont très importantes dans la notion de réseau d'aide. Nathalie Thiétard souligne « Le médecin doit pouvoir avoir une écoute ici, le pharmacien doit aussi pouvoir être soutenu par notre institution. Les centres comme les nôtres, qui sont ambulatoires, ne peuvent pas fonctionner autrement. C’est un besoin de proximité, donc il faut être accessible ». Aujourd’hui, 24 pharmacies sont partenaires dans le bassin nazairien pour délivrer gratuitement des kits de prévention. Un automate proche du CCAS existe également et est géré avec l’appui de la municipalité. Les locaux dont dispose l’association sont issus d’une convention avec la municipalité. La directrice explique « Il y a de nombreux endroits où nous avons du mal à nous implanter. Il n’y a pas longtemps le CAARUD de Nantes a dû quitter son local car trop de nuisances. Nous avons ici des lieux adaptés, avec jardins pour l’accueil notamment des chiens. La municipalité à Saint-Nazaire est à la fois forte et discrète et sans elle nous n’existerions pas ».

Les actions de prévention pour tous les publics

Les CAARUD ont été pensés pour aborder des gens en situation de grande précarité. C’est pourquoi l’association La Rose des Vents a développé une action de maraude tous les lundis après midi. Elle se déplace ainsi dans des squats, dans des lieux identifiés où les gens se regroupent avec des consommations de drogues, d’alcool et autres formes d’addiction pour distribuer du matériel de réduction des risques. À la question de l’avenir de l’association, Nathalie Thietard ne semble pas trop inquiète, même si elle est consciente des coupes budgétaires. Elle explique « La question des addictions est une thématique forte de la région Pays de Loire, on a l’assise d’être reconnus médico-social ce qui nous permet d’avoir les dotations qui garantissent notre fonctionnement. Alors c’est vrai que nous sommes face à deux géants de la santé que sont le handicap et la question de la dépendance des personnes âgées mais l’addiction est une thématique transversale de la société ».
En effet, le profil des personnes dépendantes est de plus en plus varié. Sur les consommations, il y a encore plus d’hommes que de femmes qui poussent la porte de la Rose des Vents. Les femmes en matière de tabac rattrapent les hommes et une des prochaines problématiques de santé publique sera celle du cancer du poumon chez la femme. Elles sont de plus en plus de femmes toxicomanes enceintes,  et de plus en plus à venir avec leurs enfants. À ce sujet, l’association est aussi en train de penser à l’accueil des enfants. Il y a également de plus en plus de jeunes et à cette tendance, La Rose des Vents a apporté une réponse en créant une consultation jeune « Chez Marie-Jeanne ». Elle accueille les jeunes de 12 à 25 ans en difficulté avec des consommations et/ou usages à risques. Chez Marie-Jeanne propose également d’accueillir l’entourage des jeunes.

Aller vers pour aller avec, une dynamique payante

À l’extérieur, des interventions en milieu scolaire avec les infirmières scolaires sont organisées. Celles initiées sur Guérande depuis quelques années commencent à faire parler d’elles. Une réflexion sur le pôle festif est également abordée. L’idée est de faire de la prévention en binôme et d’avoir des jeunes bénévoles avec des salariés de la Rose des Vents qui  interviendraient sur les festivals, les rave parties… « On sait qu’il y a des consommations, la circulation de produits illicites parfois dangereux dont les jeunes n’ont pas forcément conscience, notamment la cocaïne, la kétamine et d’autres produits plus naturels comme les champignons. L’idée c’est d’aborder ces questions-là sans aspect moralisateur » ajoute Nathalie.
L’association propose des formations spécifiques pour le personnel encadrant, des interventions en milieu professionnel. Les risques psycho-sociaux font partie des préoccupations actuelles puisqu’ils y a une relation étroite entre le stress et le renforcement de comportement addictif. Nathalie souligne « Il n’y a pas d’étude précise sur le comportement addictif au travail mais il y a longtemps eu aussi une tendance des entreprises à évacuer le problème. Quelqu’un qui a un comportement addictif, on aura tendance à le licencier pour ne pas se soucier de tout ça ».



 

La prévention pour faire évoluer les mentalités et les législations

Sur le plan des addictions, la directrice rappelle que nous sommes encore sur des notions d’addiction illicites. Or, il existe aussi beaucoup d’addictions liées à des consommations licites comme l’alcool, les médicaments, les comportements alimentaires… Aujourd’hui au sein de « Chez Marie-Jeanne » les parents vont plus facilement venir parce que leur fils fume du cannabis plutôt que parce qu’il boit tous les jours. Certaines consommations sont plus licites et donc considérées comme posant moins de problèmes. Comme l’explique Nathalie « On a toujours tendance à croire que c’est le produit le responsable. Or, nous,  ce qui nous intéresse c’est le comportement addictif. Ce qu’il vient dire du malaise de la personne et de sa fragilité ? ».
Le cadre de la loi de 1970 est très répressif et aujourd’hui, le monde de l’addictologie souhaiterait des évolutions en terme législatif. « Il est nécessaire d’avoir une nouvelle perception de l’addiction, autrement que dans une clandestinité agencée. Même si l’usage est condamné, la police a autre chose à faire que d’aller chasser l’usager ». Cette prise de position est renforcée par le constat d’une société de plus en plus addictogène. Une société qui revendique la performance, l’hyperconsommation où l’addiction devient la norme. Une société du zapping et du « tout-tout-de-suite » qui va provoquer les comportements addictifs. Allant plus loin et abordant la question des centres de shoot**, la directrice soulignera « Il y a plein d’expériences menées en Europe la dessus. Cela finira par arriver en France. Certaines mairies s’étaient portées candidates, cela fait partie des évolutions en matière de réductions des risques. Il y a quelques années il était impensable que l’on distribue des seringues à des toxicomanes et puis il y a eu une loi qui a permis ça. Cette politique initiée dans les années 80 a fait ses preuves. Elle a montré son efficacité non seulement sur la prévention de la transmission du sida et des hépatites, mais aussi sur la consommation de drogues et ses conséquences sociales ».
Les gens basculent dans l’addiction pour échapper à l’angoisse, à la souffrance. Dans tous les cas ils trouveront de quoi se soulager même avec une loi répressive. Par ailleurs, un nouveau facteur sociétal vient aujourd’hui perturber le domaine de l’addiction, de plus en plus de gens se servent des drogues sans être consommateur mais plutôt comme petit trafic pour arrondir les fins de mois. Un constat qui montre que les jeunes font de plus en plus ce genre de chose avec l’idée que le cannabis « c’est pas si grave ». La dépénalisation n’existe pas mais elle est de plus en plus présente dans les mentalités ce qui montre que la permissivité du cannabis a évolué. « On est aujourd’hui dans les mentalités presque dans un mouvement inverse raison pour laquelle il faut travailler sur le cadre législatif ».
* 600 personnes : 470 en CSAPA et 130 en CAARUD
** Ce dispositif a été créé dans certaines villes (Suisse, Pays- Bas, Allemagne, Luxembourg,  Espagne, Australie, Canada, Norvège...), Celles où existaient des situations très dégradées, notamment des décès par overdose en nombre très important.

Pratique
Adresse : 32 rue Roger Salengro, 44600 Saint-Nazaire
Téléphone
La Rose des Vents CAARUD et CSAPA : 02 40 01 96 12
Accueil Jeune Chez Marie-Jeanne : 02 40 62 89 76
 

Auteur : SD | 01/03/2012 | 1 commentaire
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Vos commentaires

#1 - Le 29 janvier 2015 à 19h25 par ribe patricia, Pornic
faites vous appel à des benevoles?
je serai interressée merci

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